AUTODROME BULLETIN


 

 

AUTODROME-Bulletin N° 18 – Juin-Décembre 2010

 

 

L’automobile de collection comme Œuvre d’Art

 

 

 

L’Art semble avoir accompagné l’Humanité depuis l’aube des temps. Certaines peintures rupestres néolithiques sont justement admirées comme témoignant d’une inspiration créatrice qui semble inhérente à notre nature.

Au fil des siècles, les formes d’art ont ensuite foisonné, passant par de nombreuses phases. Aux arts plastiques, sculpture, peinture, dessin, se sont joints la danse, la littérature, la musique, l’architecture, le théâtre et encore d’autres aujourd’hui comme le cinéma ou la photographie.

  

 Peinture rupestre du Sahara (Tassili n’Ajjer, environ 6000 ans avant notre ère).

 

Si les premiers récits, contes, mythes ou légendes ont existé, et perdurent, sans avoir besoin de transcription écrite, c’est avec l’invention de la « technique » de l’écriture que la littérature a pu connaître son plein développement. De même, la musique, certainement créée et transmise au début sans support matériel, a connu un véritable essor grâce aux systèmes de notation qui permettent de la transcrire.

 

L’histoire de certains arts montre aussi un rapport étroit avec la technologie : pour les tableaux, par exemple, le perfectionnement et la diversification des pigments, des peintures et des supports ; pour l’architecture, après l’utilisation de  matières naturelles, pierre, bois, argile, la découverte de nouveaux matériaux et techniques, ciment, céramique, verre, acier, aluminium, a considérablement influé sur la création.

  

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Peinture rupestre à Tin Mgharen (Algérie, 6 à 8000 ans av. notre ère)

 

On peut raisonnablement postuler que le développement des techniques est allé de pair avec l’évolution des arts, qu’il lui a même fourni des ingrédients essentiels tout au long de l’Histoire. La photographie et le cinéma sont des arts entièrement nés de l’invention de nouvelles techniques, et leur diffusion passe notamment par des procédés « mécaniques » de reproduction. Nul n’en contesterait aujourd’hui la valeur et l’importance.

 

Certes un courant de pensée se fit entendre au milieu du XIX ème siècle, notamment quand Baudelaire (vers 1860) s’opposa à la fois à l’industrie et à la photographie, cette dernière en tant qu’appareillage permettant une représentation mécanique, « exacte » de la nature, par opposition au travail inspiré de l’artiste et à la pièce unique qu’il crée à chaque fois. Le poète redoutait la suprématie du Vrai  sur le Beau. Avec le recul, le malentendu a été levé.

 

Le rapport entre l’artiste, le technicien et l’ingénieur s’est affermi et clarifié avec le temps, les créateurs explorant les nouvelles méthodes et outils que la modernité mettait à leur disposition. L’intrication de la technique en marche, de la disponibilité des matériaux nouveaux, de procédés inédits, avec le talent ou le génie de l’artiste a toujours été présente, à des degrés variables.

 

« L'histoire de toute forme d'art connaît des époques critiques où cette forme aspire à des effets qui ne peuvent s'obtenir (…) qu'à base d'un standard technique transformé, c'est-à-dire dans une forme d'art nouvelle »[1]

 

Il n’est pas nouveau de dire que le XXème siècle a consacré l’avènement de nouvelles formes d’art, empruntant bien davantage qu’autrefois à la technologie : sculptures cinétiques, instruments de musique électriques ou électroniques, structures architecturales souples, mobiles, spectacles combinant son, lumière et appareils de scénographie…

 

Certes depuis plusieurs millénaires existent l’art des bijoux, celui de la céramique, de la construction, mais plus récente est la reconnaissance avérée d’un véritable Art dans des domaines tels que l’ameublement, la décoration, le vêtement, les objets mécaniques (horlogerie, automobiles, aéroplanes, outils et machines).

 

 

 

 

 

Locomotive 242 A1, prototype signé André Chapelon (1943) : la plus puissante locomotive à vapeur d’Europe, malheureusement détruite en 1960. 226 Tonnes, 27 m., 4000 chevaux

 

 

 

Parmi les constructeurs automobiles, le nom d’Ettore Bugatti[2] est souvent associé au mot Art. Il est devenu courant de parler de sculpture mécanique pour évoquer une automobile ancienne de valeur. Il est intéressant de se demander en quoi on peut dire que certaines automobiles sont des œuvres d’art [3].

 

Au fond, l’activité du sculpteur pourrait être définie comme la mise en forme de matière en vue d’exprimer et communiquer des émotions, ou de procurer un plaisir esthétique. Les  stylistes et ingénieurs qui créent des véhicules peuvent-il répondre à cette définition ?

 

 

 

Bugatti Type 41 « Royale », dit Coupé Napoléon (1927-1930)

 

 

D’un côté, il est indéniable que leurs créations, œuvres matérielles en trois dimensions, procurent en effet dans certains cas l’émotion et le plaisir caractéristique de l’œuvre artistique. On sait que pour bon nombre de passionnés et de collectionneurs, la contemplation des plus belles automobiles est un plaisir sans mélange, de nature esthétique, au même titre que celui qu’un amateur de sculpture éprouve devant une statue de marbre ou un bronze.

 

Certes, le créateur d’une carrosserie n’a généralement pas formé de sa propre main l’objet de sa création. Mais dans la sculpture traditionnelle, c’est souvent le cas également : le coulage et le polissage des bronze par les fondeurs fait partie intégrante de l’œuvre. De même que Rodin sculptait le marbre et confiait la fonderie à des ateliers de grand talent, les stylistes automobiles de l’époque d’or du milieu du XXème siècle œuvraient bien souvent aussi à la forme en plâtre ou en bois servant ensuite à l’exécution de la carrosserie en métal.

 

De la même façon, l’architecte conçoit et dessine les plans de bâtiments qui seront construits par des ouvriers et des techniciens spécialisés. L’œuvre n’en est pas moins reconnue comme un travail d’art.

 

La réflexion sur ce sujet porte aussi sur le fait qu’une automobile est avant tout un objet d’usage, tandis que la conception habituellement admise pour l’œuvre d’art est qu’elle « ne sert à rien », ne remplit aucune fonction. On peut penser à la phrase d’Albert Camus, dans un tout autre contexte « Je ne vois pas ce que l’inutilité ôte à ma révolte et je sens bien ce qu’elle lui apporte »[4]. L’œuvre d’art, inutile, ne prendrait-elle toute sa mesure et sa grandeur que si elle n’est créée que pour elle-même ?

 

 

 

Bizzarrini Manta, dessin Giorgietto Giugiaro (1968)

 

 

 

Là encore, l’architecture illustre parfaitement le fait que certaines œuvres d’art possèdent au contraire une double nature, offrant une valeur à la fois artistique et fonctionnelle : dans le cas d’un bâtiment, qu’il soit privé ou à usage public, son intime relation avec la vie de ceux qui y résident ou qui en sont les usagers confère une résonnance particulièrement profonde à l’œuvre et lui donne même son sens et sa raison d’être.

 

Mais ce n’est pas le seul domaine : l’horlogerie de collection, les meubles précieux et rares, les machines et outils anciens combinent également la richesse esthétique, l’émotion procurée par un travail exprimant souvent force, sensibilité, équilibre, avec la fonction concrète de l’objet ; celle-ci ne contrevient pas à la nature artistique de l’objet, elle en est complémentaire, et sans doute même l’enrichit-elle d’une signification plus profonde.

 

Les instruments de musique sont un autre univers où de véritables artistes sont reconnus, comme les plus célèbres luthiers, Antonio Satradivari[5], Giuseppe Guarneri, Niccoló Amati et autres Jacobus Stainer. La qualité et la beauté de leurs créations dépassent dans certains cas largement la qualification d’ « instrument ».

 

Au-delà même des prix extrêmement élevés que peuvent atteindre[6] ces merveilles, l’attachement extraordinaire que les musiciens leurs vouent et le sublime plaisir qu’ils procurent au public, révèlent que ces objets possèdent une qualité qu’on ne peut quantifier ni rationnaliser, commune avec les plus grandes œuvres artistiques.

 

 

 

strad violin amati violin

 

Violon d’Antonio Stradivari – détails (environ 1710).

 

 

 

Sous cet éclairage, on est tenté de paraphraser le philosophe en écrivant : je ne vois pas ce que la fonctionnalité ôterait à l’œuvre, et je vois bien ce qu’elle lui apporte…

 

L’interpénétration du travail artistique et de la recherche technique dans la conception d’une machine ou d’un objet fonctionnel conduit en réalité à une forme d’expression en quelque sorte parachevée, complète, où le beau, l’émotion, peuvent transcender le caractère même de la matière. Celle-ci est alors comme éclairée de l’intérieur, animée d’une force que ni l’esthétique ni l’utilité fonctionnelle, pris chacune isolément, ne pourraient lui offrir.

 

C’est d‘ailleurs sur ce type de sentiment et de perception de ces machines que s’est bâti le mythe des plus beaux avions, navires ou automobiles : pouvoir non seulement les admirer, comme objets, mais aussi en prendre les commandes, les faire vivre, déployer leurs pouvoirs, est une expérience totale, inédite dans les autres formes d’art purement « visuels ».

 

Nous avons déjà évoqué [7] la composante « transcendante » des véhicules et machines, ce trait spécifiquement humain que possèdent certains objets élaborés, parce qu’ils traduisent des capacités potentielles innées de l’homme, absentes chez les autres espèces : acquérir un ou plusieurs langages (communication symbolique, articulée), créer des œuvres artistiques, comprendre les lois qui régissent l’univers, inventer des outils et techniques qui démultiplient ses forces et ses moyens naturels.

 

La création, la science, l’art, semblent faire partie des besoins supérieurs de l’homme, au-delà de ceux fondamentaux : nécessité de s’épanouir en communicant grâce au langage, en créant des œuvres, en concevant des théories d’explication du monde, et en mettant au point des outils et machines qui lui autorisent une expansion virtuellement infinie de ses possibilités.

 

Dans ces objets mécaniques complexes, la beauté des formes ne se limite en effet aucunement à l’apparence extérieure : le mouvement des pièces, même invisibles, à l’intérieur d’un  moteur, la compression des fluides, le glissement des métaux, la flexion des ressorts, l’équilibre dynamique du véhicule lorsqu’il se met en mouvement ou s’arrête, tout concourt à une sensation artistique inédite, aux multiples dimensions, mariant la matière, la sensualité et l’intellect[8].

 

 

 

 

 

 

Exposition des Automobiles de la Collection Ralf Lauren au Musée des Arts Décoratifs

 

 

 

Soulignons encore deux convergences entre l’Automobile Classique et Art : l’une est leur mode de production, qui met en œuvre l’esprit et la main de l’homme, prolongés par l’outil. Cette création est à chaque fois commencée et achevée de manière unique[9] - avec souvent des variantes dans un même modèle pour l’automobile. L’autre est la grande disproportion entre d’une part le faible nombre d’œuvres produites (quelques dizaines parfois, soit la production de certains peintres ou sculpteurs, mais aussi celle de petits constructeurs devenus mythiques) et d’autre part l’intérêt immense, la fascination qu’elles exercent sur des millions de passionnés dans le monde entier, par-delà les cultures.

 

Ainsi, on peut raisonnablement avancer que l’une des forces agissantes qui poussent en ce moment – et depuis quelques dizaines d’années – les passionnés, esthètes et collectionneurs vers l’Art Automobile est la reconnaissance de plus en plus large de ces œuvres comme l’apogée d’un genre qui a maturé au fil des siècles : l’alchimie de la science, de la technique, et du génie dans la mise en forme de  la matière.

 

Nous disons bien apogée. Il est possible en effet que ce domaine d’activité, qui engendre des œuvres nées concrètement de la main de l’homme, guidée par son esprit, son talent et son goût, soit en voie de se résorber peu à peu, ne nous laissant plus que de rares témoignages d’une aventure humaine incomparable.

 

L’avancée inéluctable de l’automatisation (même dans la conception, depuis la CAO et le DAO[10] jusqu’à la création de circuits électroniques logiques, la rédaction d’articles et de textes - déjà une réalité hélas…) semble gagner rapidement du terrain, menaçant de reléguer, en matière de création, les forces de l’esprit humain à un rôle minoritaire, qui risque même de s’effacer dans certains domaines…

 

Une raison de plus de préserver jalousement et avec passion les Automobiles Classiques, œuvres d’Art à part entière, et leur histoire.

 

 

 

 

 

Ferrari 412 P (1967)

  

 

 

[1] Walter Benjamin, « L’Œuvre d’art à l’époque de sa reproduction mécanisée », 1936

[2] Le père d’Ettore Bugatti, Giovanni, était un architecte et sculpteur, et son frère, Rembrandt Bugatti, un sculpteur dont les œuvres sont aujourd’hui très recherchées.

[3] Sotheby’s organise une importante vente aux enchères le 21 Novembre 2013 à New-York ; elle porte comme titre « Art of the Automobile » (l’Art de l’Automobile).

[4] Cahiers, Septembre 1937

[5] Dans l’atelier d’Antonio Stradivari (1644-1737) a Crémone ont été construits un millier de violons, dont un peu plus de 600 ont subsisté jusqu’à nos jours. Tous sont bien sûr différents, parfois subtilement, leur sonorité et leur valeur dépendant de leurs détails de fabrication, mais aussi de la qualité du vieillissement.

[6] Les meilleurs violons des XVIIème et XVIIIème siècle se négocient plusieurs millions d’Euros ; les musiciens n’ayant généralement pas de tels moyens, des instruments (violons, altos, violoncelles notamment) sont parfois acquis par des banques, soit à titre de mécénat, soit même comme un investissement.

[7] Lire Autodrome Bulletin N°8, Juillet 2004.

[8] Des artistes célèbres comme Andy Warhol, Alexandre Calder, David Hockney, ont travaillé sur des automobiles comme ingrédient et support de leur peinture.

[9] Pour les automobiles réellement exceptionnelles et aux époques dont nous parlons (jusqu’aux années soixante-dix environ) : carrosserie formée à la main, fonderie et usinage des pièces à l’unité, commandes spéciales…

[10] DAO : Conception Assistée par Ordinateur et CAO : Dessin Assisté par Ordinateur.

 

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